1945/2017 Une (très) brève histoire de la psychologie à l’école primaire

Par Le 16/10/2017 0

1945/2017 Une (très) brève histoire de la psychologie à l’école primaire

 

Première partie : Evolution des missions attribuées aux psychologues scolaires,

 

Deuxième partie : Quel statut pour les psychologues du premier degré ?

 

ET MAINTENANT ? 

1945/2017 Une (très) brève histoire de la psychologie à l’école primaire

Jean-Claude Guillemard  psychologue , Dr en Sciences de l’Education, ancien Président de l’AFPS (1981/1987) et de l’ISPA (1985/1990), représentant permanent de l’ISPA auprès de l’UNESCO.

Cette présentation résume -très succinctement - une intervention faite à Paris à l’occasion du Cinquantenaire de l’AFPEN ((2012) et une autre  à Angers au  24e congrès de l’AFPEN(2015).

Première partie : Evolution des missions attribuées aux psychologues scolaires,

Je m'en tiendrai ici  à la naissance de notre profession  au ai  décours de la 2e guerre mondiale puis à ses évolutions successives ,

Dès 1942,43 le Conseil National de la Résistance (CNR)met  en place une  Commission chargée de préparer la réforme démocratique de l’enseignement,, Successivement présidée par Paul Langevin puis Henri Wallon (dont t  les  noms resteront attachés  à ce plan,) cette commission voulait  favoriser la mise en œuvre d’une pédagogie nouvelle  faisait une place à la psychologie (titre IV) à qui Wallon donne pour rôle  de mieux connaître l'enfant  et  (je cite) :

  • de découvrir « les causes intellectuelles, caractérielles et sociales de son comportements scolaire ».
  •  en s'interdisant  « une sélection qui refuserait à certains enfants et même au plus grand nombre, les possibilités de culture qui doivent être mises au service de tous »
  • en se gardant de « L’enregistrement stérile de situations que leur simple  constatation fait alors tenir pour définitivement établies, nécessaires inévitables. »

La psychologie scolaire est ainsi un outil  mis au service du pédagogue :  elle a   vocation à améliorer la pratique pédagogique sous l’angle de la relation maître-élève favorisée par une meilleure connaissance de l’enfant, mais également sous l’angle de la recherche C'est dans cette perspective que les pionniers , Bernard Andrey, à Grenoble (1945), la première promotion d'instituteurs (1946) suivie de la première promotion de professeurs de lycée(1947,) ont été formés et se sont illustrés dans les premiers congrès nationaux (Sèvre 1952) et internationaux Hambourg (1954),

Leur expérience et les résultats de leurs travaux seront  repris par l'UNESCO pour servir de modèle mondial ,

Pourquoi après un tel démarrage flamboyant, autant de difficultés  à installer  et développer la psychologie à l'école , dans notre pays ,

On ne comprendrait  pas  les vicissitudes de notre profession  si on se dispensait de l'analyse  du contexte politique  dans lequel elle est née, s'est développée a failli disparaître plusieurs fois et a évolué dans  un sens  que ne souhaitai t pas ses son fondateur :

Langevin, Wallon  et d'autres membres du Comité de la réforme  sont  membres du Parti Communiste Français,

1947 :C'est le début de la « guerre froide »,  les ministres communistes  sont débarqués du gouvernement ; la commission de l'enseignement est félicitée pour son travail (par le ministre socialiste Naegelen) mais la réforme  reste dans les tiroirs,

1953 Les instituteurs  psychologues scolaires parisiens ( 26 en tout)sont invités à reprendre leur classe  comme instituteurs, La formation  est stoppée,

1960 Le dépistage des enfants arriérés pour les classes de perfectionnement  confiées aux titulaires du CAEA(Certificat d'Aptitude à l'enseignement des Arriérés) demande un personnel  plus qualifié que les  secrétaires de commission de l'enseignement spécial, (CCPE et CDES créées en 1948), Le Ministère  de l'Education Nationale recrute de nouveau et forme   en deux ans des psychologues scolaires ( uniquement des instituteurs)dans 4 Centres nationaux.

A Paris,  Psychologues  Scolaires et Conseillers d'orientation suivent en commun à l'INETOP, les cours du  professeur René Zazzo, collaborateur avec Hélène Gratiot Alphandéry, de Wallon , . C'est le temps du dépistage

Après  1968 et la mise en cause de l'école comme outil  de la ségrégation  scolaire et du maintien de l'ordre social (Bourdieu, Baudelot Establet., Pinel et Zafiropoulos..)dont les psychologues et la psychologie (notamment la méthode des tests , Michel Tort ) seraient les fourriers, le concept de prévention  de l'échec scolaire se répand, Avec le CRESAS (Centre de Recherche sur l'Education Spéciale et l'Adaptation Scolaire ) dirigé par Mira Stambak ancienne collaboratrice de Zazzo,  mais plutôt inté ressée par les thèses  de Piaget ,la  prévention  s'organise avec la création des classes d'adaptation  et des Groupes d'Aide Psycho-Pédagogique (GAPP) dans lesquels sont enrôlés les psychologues scolaires,

 Ce temps de la prévention  s'étendra sur 20 ans (1970-1990), sans que pour autant la mission de dépistage pour l’orientation des élèves vers les classes et es établissement spécialisés se réduise, bien au contraire. Malgré des résultats  mitigés quant à leur mission principale, prévenir l'échec scolaire, les GAPP se verront reconduits  avec les mêmes personnels, sous un nouveau nom (RASED) et avec de nouvelles missions : l'aide aux élèves en difficulté.

Dans la même période on voit le niveau  de recrutement initial des instituteurs ( et donc des futurs psychologues scolaires) s'élever du baccalauréat à la licence puis à la maitrise , mais avec la création du DEPS (Diplôme d'Etat de Psychologie Scolaire 1990) la formation professionnelle se réduit à une seule année dans l'un des 6 puis 5 puis 4centres de formation nationaux .

Avec la circulaire de 2005, c'est le temps de l'intégration  devenue rapidement inclusion scolaire qui va accaparer la majeure partie du temps des psychologues du premier degré et leurs  relations  avec les Maisons Départementales  des Personnes en situation de Handicap (MDPH) .Ce passage  de la gestion de l'orientation des élèves en situation de handicap , de l'Education Nationale via les CDES vers les Conseils Départementaux  responsables des MDPH  ne s'est pas fait sans difficulté s et les dysfonctionnements de ces nouvelles institutions ont des répercussions sérieuses sur les conditions de travail des psychologues, sans pour autant améliorer significativement la situation des enfants, de leurs familles et des enseignants . L'insuffisance puis le démantèlement des équipes des RASED notamment après 2007 a privé  les écoles de moyens  d'aide aux élèves  en grande ou moyenne difficulté et à considérablement réduit les missions de prévention notamment à l'école maternelle,

 

Deuxième partie : Quel statut pour les psychologues du premier degré ?

Selon Henri Wallon, le psychologue scolaire devait connaître  l'école et faire partie du personnel de l'école, Dans cette perspective les pionniers de la psychologie à l'école ne mettaient  pas en question leur statut administratif d'instituteur ou de professeur de lycée, Pourtant, dès 1948, Bernard Andrey, premier psychologue scolaire  ,dans un courrier adressé à René Zazzo, attribuait ses difficultés de relations avec l'IA de l'Isère  au fait que son statut d'instituteur  n'était pas en accord avec ses responsabilités de psychologue,

Les conflits dans le monde syndical ont également joué un rôle : scission de la CGTU et création de la CGT-FO, Autonomie  de la Fédération  de l'Education Nationale, ralliement  des enseignants CGT grâce au droit de tendance mais persistance  de point de vues divergents sur le statut et le rôle des psychologues  au sein du Syndicat National des Instituteurs (SNI)

C'est à partir de cette question du statut qu'en 1975 l'AFPS ( Association Française des Psychologues Scolaires fondée en 1962)connut une scission: une partie de ses adhérents – constatant  ce qu'ils considéraient comme l'immobilisme des syndicats de l'époque  ( SNI et FEN) -décidèrent de fonder un syndicat catégoriel, le SPEN(Syndicat des Psychologues de l'ducation Nationale,

Témoigne aussi de la persistance des divergences, après  la création de la FSU et du SNUIPP,  un certain nombre de psychologues  fondent  leSNPsyEN r allié à l'UNSA,

 Mais dès 1976 l'AFPS et le SNES publiaient un communiqué commun  revendiquant un statut de psychologue exerçant ses missions  de la maternelle à l'université  au sein d'un service unifié  En se retrouvant au sein  de la Coordination Nationale  des Organisations de Psychologues (1980) puis de l'ANOP(1981 ) l'AFPS, l'ACOF et le SNES apportaient une contribution significative  à la lutte  pour la reconnaissance légale du titre de psychologue  finalement reconnue par la loi de 1985 et  mise en œuvre par les décrets de 1990, Au fil des années  et des rencontres avec les représentants successifs  du Ministère de l'Education Nationale les espoirs de voir  reconnaître  la profession , passèrent par des hauts et des bas. Dans le GOPE (Groupe des Organisations des Psychologues de l 'Education) les  revendications  concernant la formation, l'organisation et les missions de la profession  se précisèrent peu à peu, Malgré les difficultés du combat unitaire  compte tenu des spécificités et des options des diverses organisations de psychologues , des actions communes  purent être menées : L' organisation des Etats Généraux pour la Psychologie de l’Education en 1988 et des Etats Généraux de la Psychologie s en 2001 avec  la publication d'un Livre Blanc  illustrèrent quelques- uns   de  ces  moments importants.

Toutefois  les menaces sur l'existence même de la profession ne manquèrent pas .La diminution du recrutement  et la suppression de plusieurs centres de formation  ainsi que  la réduction  drastique des postes de RASED ne permettaient pas  d'envisager l'avenir  avec optimisme,

Mais après 2012 et la mise en chantier de la loi sur la refondation de 'école   les perspectives d’évolution s'éclaircirent. Pour la première fois depuis de nombreuses années, nos interlocuteurs au Ministère de l'Education Nationale- dont la Ministre elle-même- semblaient avoir la volonté  politique d'aboutir à une solution proche de nos  attentes .

ET MAINTENANT ? Il faut que les engagements soient tenus  car le temps presse et nous devons  rester vigilants. Les perspectives politique en 2017 peuvent légitimement nous rendre inquiets,  mais même si  rien de ce que nous avons  obtenu n'est remis  en question , certains poinnts  sont encore à régler. En outre,    notre profession va vivre des changements, notamment ceux  liés à l'arrivée  des nouveaux psychologues du premier degré  dont la formation et la culture  différera de celle des générations précédentes issues  du moule des instituteurs et des  professeurs des écoles et qui ont souvent acquis leur formation complémentaire au -delà  du DEPS- tout en exerçant leur métier à temps plein. Les organisations  professionnelles syndicales et associatives devront  s’interroger sur les formes d' organisation et d' action pour répondre aux besoins et aux attentes  de ces nouvelles générations de psychologues .

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